Sommaire
Mise à jour
Informations mises à jour le 13/11/2016.
Ce texte se réfère à la législation française.
Si vous trouvez une erreur ou un manque, n’hésitez pas à me communiquer le texte de loi ou la jurisprudence en référence pour mise à jour !
Ne zappez pas cette partie juridique !
Ce qui suit est très important pour connaître le droit des photographes.
- Vous apprendrez ce qu’un modèle ou un photographe peuvent faire ou non des clichés pris pendant une séance photo.
- Vous apprendrez ce que sont le droit à l’image et le droit d’auteur.
- Protégez-vous en prenant connaissance de ce que dit la loi française
- Évitez certains pièges en signant un contrat entre la modèle et le photographe
Les droits protégeant le photographe
Un photographe a non seulement des droits, mais aussi des obligations selon la loi française. Rien de bien méchant, les principes sont somme toute très simples, mais les implications sont nombreuses.
Cela peut même devenir très compliqué en cas de problème avec un modèle qui vient se plaindre, ou lorsqu’un photographe veut vendre des photos...
Droit d’auteur
Le principe général peut être simplement énoncé : le photographe, créateur de l’œuvre originale (c’est à dire les photos), est propriétaire de son œuvre et des droits, même s’il donne ou vend ses photos. L’article L.111 du Code de la Propriété Intellectuelle définit le principe de « droit d’auteur » et de « propriété intellectuelle ».
A partir du moment où le cliché est pris, la photo appartient au photographe quoi qu’il advienne, sous réserve qu’il ait respecté le principe de vie privée (voir plus loin).
Et cela va même plus loin : même si le photographe donne ou vend l’original de ses photos, il conserve tout de même des droits sur celles-ci ! (droit moral ou immatériel)
Divulgation des photographies
L’article L.121-2 du Code de la Propriété Intellectuelle stipule que seul l’auteur d’une œuvre a le droit de la divulguer de manière publique, et qu’il détermine non seulement le procédé de divulgation, mais en fixe aussi les conditions.
Exploitation des photos par le photographe
L’article L.123-1 du Code de la Propriété Intellectuelle précise les termes de l’exploitation d’une œuvre : le photographe a un droit exclusif d’exploiter son œuvre sous quelque forme que ce soit, et même d’en tirer profit.
Les droits d’exploitation ne peuvent être cédés que par le photographe : un tiers (par exemple la modèle photographiée) ne peut donc pas revendre vos photos sans le consentement du photographe.
Les lois protégeant les modèles
Retenez bien ceci : si le photographe est le propriétaire de son œuvre et des droits d’auteur, il n’est en aucun cas propriétaire de l’image de la personne photographiée.
Le respect de la vie privée
Chacun a droit au respect de sa vie privée : l’article 226 du Code Pénal précise bien qu’il est interdit de fixer, enregistrer ou transmettre, sans le consentement de celle-ci, l’image d’une personne se trouvant dans un lieu privé.
Ceci dit, si cela a été accompli en toute connaissance des sujets, sans qu’ils ne s’y soient opposés alors qu’ils étaient en mesure de le faire, alors le consentement est présumé.
Il faut donc comprendre qu’il y a plusieurs points à respecter :
- Obtenir le consentement préalable d’une personne pour la photographier, sinon le procédé est considéré comme malhonnête
- Le lieu de prise de vue est très important, car il peut être public ou privé. Vous devez en principe avoir le consentement du propriétaire de l’endroit où vous photographiez, même dans un lieu public car dans ce cas c’est l’État qui en est propriétaire. Mais la notion est un peu floue dans les lieux publics, par exemple avec la photographie de rue qui est un peu à part grâce aux différentes jurisprudences
Le droit à l’image
L’article 9 du Code Civil réaffirme le principe du respect de la vie privée, mais précise surtout ce que peuvent faire les juges en cas de manquement.
Ce qui en découle : un photographe ne peut pas publier les photos représentant un modèle sans son consentement, cela s’appelle communément le « droit à l’image », même s’il n’est pas reconnu directement par la loi.
La modèle possède donc un droit d’opposition à l’utilisation des photographies la représentant, en particulier si celle-ci porte atteinte à sa dignité ou sa réputation.
Les nombreuses jurisprudences rendent le sujet tellement complexe qu’il est difficile d’aller plus loin sans être un juriste, ce que je ne suis pas !
Le site ServicePublic.fr a publié une fiche pratique récapitulative sur le droit à l’image et protection de la vie privée.
Un cas particulier étonnant : le droit à l’image des personnes décédées. A la mort de quelqu’un, sa personne morale n’a plus d’existence juridique, elle ne peut donc plus porter plainte (forcément !). Et pour les proches alors ? En 2009, une décision de justice stipule que « les proches d’une personne décédée ne peuvent contester la reproduction de son image qu’à la condition d’établir le préjudice personnel qu’ils en éprouvent, déduit le cas échéant d’une atteinte à la mémoire du mort ou au respect qui lui est dû ». Source : cabinet d’avocats de Murielle CAHEN
Les autres lois françaises applicables aux photographes
Les lois vues précédemment protègent les photographes et les modèles, mais il ne faut pas faire n’importe quoi non plus !
Photographier des mineurs
Seules les agences de mannequins possédant une licence préfectorale peuvent employer des mineurs de 16 ans : consulter l’article L211-6 du Code du Travail et L211-7 du Code du Travail.
Ceci dit, il est possible de photographier un mineur avec une autorisation écrite des représentants légaux. En complément, et pour éviter tout problème par la suite, il est indispensable qu’un représentant légal soit présent lors de la séance photo. Il n’est bien entendu pas question de rémunération.
Attention aussi au stockage ! Si des photos de mineurs sont volées et diffusées (elles peuvent même être trafiquées), les représentants légaux pourraient se retourner contre le photographe.
Il est interdit pour les publications de mineurs de 18 ans de donner des renseignements autres que ceux concernant leur création artistique, cf l’article L211-10 du Code du Travail.
Si vous voulez aller plus loin, les articles L211-6 à L211-14 du Code du Travail s’appliquent aux modèles mineurs.
Il est bien entendu qu’il est interdit de photographier des mineurs dénudés, même en petite tenue, et encore moins de diffuser les photos !
Les lois françaises sont très claires sur ce point avec l’article 227-23 du Code Pénal.
Il est même précisé que s’il y a un doute sur l’âge de la personne photographiée, il faudra pouvoir prouver qu’elle était majeure au moment de la prise de vue : « une personne dont l’aspect physique est celui d’un mineur ».
Le cas de la diffusion d’images de mineurs dénudés est même prise en compte dans l’article 227-24 du Code Pénal.
Deux conseils :
- Faites comme moi, un photographe amateur peut éviter toutes ces peines et ne photographier que des personnes majeures !!!
- En tout début de séance je conseille au photographe de photographier la modèle tenant sa carte d’identité devant elle, lisible.
Le nu en photographie
La représentation de la nudité est aujourd’hui largement admise par la société. Les juges rappellent aussi que « la représentation du nu, immémoriale, n’est pas illicite en soi » (TGI Paris, 1re ch., 1re sect., 11 janv. 1990 : JurisData n° 1990-040518).
Par l’adjectif « immémoriale », les juges reconnaissent que la représentation du nu est admise depuis les débuts de la civilisation.
La loi française n’interdit donc pas de photographier une personne nue. Il y a cependant des restrictions, citées auparavant : le respect de la vie privée et le droit à l’image.
Ceci vaut si la modèle donne son autorisation d’être photographié.
Deuxième condition, la prise de vue doit se dérouler dans un lieu privé, en prenant toutes les précautions pour que la modèle ne puisse être vue du public.
Le cas des lieux publics est un peu plus compliqué, car une rue est bien un lieu public, mais la terrasse d’un café est un lieu privé !
Le statut de mannequin ou modèle
L’article L7123-2 du Code du Travail définit précisément le statut de modèle (posant pour un artiste) ou mannequin (à des fins de présentation commerciale).
Le texte prévoit même le caractère occasionnel, avec ou sans réutilisation de l’image.
D’après ce texte, il n’y a pas de différentiation de statut entre modèles. Vous trouverez les appellations de modèle amateur (le mot « occasionnel » en donne le sens), semi-pro (appellation trompeuse souvent trouvée sur internet) ou professionnel : pour la loi il y a des modèles au sens large du titre : quel que soit le statut proclamé par la modèle, les règles sont les mêmes pour tous.
L’article L8221-1 du Code du Travail interdit le travail dissimulé.
En conséquence un modèle qui pose contre rémunération sans contrat ou sans déclaration, a ce qu’on appelle une « activité dissimulée » ce qui est illégal.
Une telle relation met hors la loi aussi bien la modèle (article L8221-5 du Code du Travail) que le photographe (article L8221-3 du Code du Travail).
N’étant pas professionnel de la photographie, au vu de ces textes j’ai plutôt tendance à jouer la carte de l’échange de bons procédés !
La solution : signer un contrat
Comme tout ceci est compliqué ! Il existe pourtant un moyen très simple de protéger les droits des uns et des autres : signez un contrat, même si le photographe ne rémunère pas la modèle.
Ce contrat, liant le photographe au modèle, doit comporter entre autres :
- L’identité des personnes
- Les dates et lieux de la séance photo
- Les dispositions concernant la diffusion (ou non) des clichés par le photographe et/ou la modèle
- La date et signature de chaque partie
Ne faites pas l’impasse sur le contrat, vous pourriez le regretter plus tard...
Le mot final d’
En résumé, l’œuvre et le support appartiennent au photographe (même s’il vend ou donne cette œuvre), et l’image de sa personne appartient au modèle :
- Pour photographier un modèle, le photographe doit obtenir son autorisation écrite, non seulement pour la séance mais aussi pour chaque parution ou diffusion publique, comme les galeries d’un site web
- La modèle peut revenir à tout moment sur sa décision, et même demander l’arrêt de la diffusion d’une ou des images déjà réalisées, mais pas rétroactivement (par exemple si vous avez déjà publié des photos dans un journal ou un livre avec son accord à l’époque)
- Je ne travaille pas avec les mineures pour ma part, et évite les rémunérations « sauvages »
- Toutes les dispositions d’une séance seront bien entendu écrites dans le contrat entre le photographe et la modèle, prévoyez un contrat systématique par séance
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Nathalie Baye
Téléstar 2001